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Saint Joseph, Le Bois Briand, Bout des Landes, Malakoff, Gaudinière, le Breil, Boucardière, Clos Toreau, Mangin, Hauts Pavés, Mellinet, Dalby, La Bottière, Talensac, Pin sec, Santos Dumont, Port Boyer, Viarme, Chantrerie, Chantenay, Quai de la Fosse, Doulon, et tant d’autres noms qui nous évoquent, à chacun et chacune, des images plus ou moins assurées, des souvenirs plus ou moins vivaces. Pour certains, ce sont des souvenirs furtifs, quelques minutes où l’on se sera assis sur un banc, une rue qu’on aura arpentée par hasard. Pour d’autres, ce sont des souvenirs qui s’étalent sur des années, toute une vie parfois, où l’on aura vu un quartier évoluer, changer, se transformer, parfois du tout au tout.

Dans chaque quartier nantais, nous vivons, nous inventons, nous luttons, nous résistons, nous nous nous rencontrons, nous nous baladons, nous nous débrouillons, nous nous rassemblons. Vu d’en haut, là d’où sont dessinées nos villes, ce sont des touts petits points sur la carte. On pourrait croire qu’ils sont anecdotiques. Du haut de la tour Bretagne, pas sûr qu’on puisse tous les distinguer.

Alors on a vite fait de croire que ce n’est pas là que ça se joue, que l’essentiel est à faire au niveau national, européen, mondial. La mondialisation, les marchés, l’attractivité internationale : voilà ce qui compte, nous dit-on. Nous sommes persuadés du contraire.

À quel autre endroit du monde se passe-t-il ces choses dont on nous parle, si ce n’est dans nos quartiers ? La mondialisation, c’est cette chaîne de restaurant qui remplace le dernier bistrot du coin. Ce sont dans nos villes que s’incarnent les inégalités, les problèmes de santé dus à la pollution, les difficultés sociales, mais aussi, mais, surtout, l’entraide. Les solutions qu’on invente quand on doit se débrouiller par soi-même, les coups de main qu’on file à ses voisins, aux amis qu’on se sera fait dans le coin. Les petites résistances qu’on oppose à ces panneaux publicitaires qui nous gâchent le paysage.

Il y a des grandes choses très abstraites qui se jouent dans des petites choses très concrètes. Des choses qui s’incarnent dans notre quotidien, qui nous font remettre en question nos croyances, interroger les évidences.

A-t-on aujourd’hui la capacité d’agir sur nos quartiers ? A-t-on la capacité de résister à leurs évolutions programmées ? A-t-on la capacité de refuser à ce promoteur de défigurer notre lieu de vie quotidien, de nous enlever la lumière du soleil ? A-t-on la possibilité de s’installer dans la rue, pour quelques heures, pique-niquer, discuter ? A-t-on accès à des espaces couverts, pour se réchauffer, se rassembler à quelques-uns pour refaire le monde ? A-t-on accès à des toilettes, à une fontaine ? Le premier arbre est-il devant chez nous ou de l’autre côté d’une route ? Est-il dangereux de laisser les enfants se promener sur les trottoirs, de faire du vélo dans notre rue ?

Nous refusons d’être simplement posés-là, consommateurs d’une ville qui se fait sans nous, et, parfois, contre nous. Lorsqu’en voulant attirer des touristes, nos loyers augmentent. Lorsque des espaces librement accessibles se bardent de clôtures et de caméras. Lorsque les arbres sont coupés, les bancs retirés, pour nous empêcher de nous attarder à l’ombre d’un platane. Lorsque des familles sont invitées à déménager à quarante kilomètres de Nantes pour permettre une montée en gamme du quartier.

Toutes ces petites choses ne sont pas anecdotiques, mais dessinent un modèle de société. En unissant nos forces, à toute petite échelle, nous pouvons tout changer. Faire en sorte que notre quartier soit accueillant. Limiter les nuisances des grands projets décidés d’en haut. Ouvrir des espaces où la ville est à nous, où nous sommes plus que des passants, où les voisins peuvent se rencontrer et s’organiser. Expérimenter d’autres modes de vie, où l’on reprend la main sur son temps, sur l’endroit où on habite, sur la façon dont on s’alimente. Où l’on monte avec ses voisines et voisins une AMAP, un GASE, un lieu de vie partagé, un jardin collectif, un espace pour se poser dehors, un collectif d’habitant·e·s. D’anecdote en anecdote, on se met à se parler, on apprend à s’organiser collectivement. On est plus fort pour refuser qu’on nous impose des choses d’en haut. On imagine nos propres projets, qui vont dans une direction radicalement différente.

Tout ça se joue dans nos quartiers, pas ailleurs. Ils sont les points de départ d’une politique du quotidien, qu’ont en horreur ceux qui prétendent nous administrer, nous diriger, nous employer. Employons-nous à prendre soin de nos quartiers, à investir nos lieux de vie, à y construire quelque chose qui vienne de nos intentions, de nos besoins et de nos aspirations.

Mettons en lien les initiatives, les associations, les collectifs de nos quartiers. Organisons des espaces de discussion sur nos places. Inventons des choses ensemble. Enquêtons et agissons sur nos quartiers. Faisons nos quartiers en commun.

// Mercredi 24 avril, lançons des enquêtes dans chacun des quartiers nantais ! Retrouvons-nous, entre habitantes et habitants d’un même quartier, partageons nos constats, parlons à nos voisin·e·s et acteurs du quartier, initions des actions simples pour mobiliser notre quartier. Enquêtons ensemble sur les problèmes du quartier et les réponses que nous voulons y apporter. C’est à 19h30, salle de la Cigarière. //