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Le premier confinement fut celui de la sidération. Et cette sidération ne s’est pas arrêtée avec le confinement, puisque nous sommes allés d’adaptations en adaptations. En quelques mois, bien des éléments de nos vies ont changé, nos situations financières se sont aggravées, la galère et la débrouille se sont un peu plus normalisées, et nous avons dû modifier jusqu’aux gestes les plus simples et les plus automatiques : se parler, montrer de l’affection à quelqu’un, sourir à un passant, vouloir aider quelqu’un dans la rue sans risquer de le contaminer…

Pendant le premier confinement, de nombreux appels à un autre monde ont été lancés. Las, au déconfinement, c’est comme si la période et ses rêves n’étaient qu’une parenthèse bien vite refermée : tout reprit de plus belle et l’expression “monde de demain” devint vite has been. Pour un autre monde, vous repasserez messieurs dames les idéalistes ! 

Pire, le gouvernement et les politiques ont appuyé sur l’accélérateur comme s’il fallait se dépêcher avant la prochaine crise, comme si nous étions pris dans une folle spirale auto-destructrice. 

  • Plutôt que de restructurer une santé de proximité, accessible à toutes et à tous, partout sur le territoire — parce que c’est cela qui nous a fait défaut — on se contente de mettre un peu plus d’argent dans l’hôpital public, sans réel changement, sans sortir des logiques de marchandisation et de néomanagement de la santé. 
  • Plutôt que de développer une autre économie, plus respectueuse des personnes et de la planète, on continue de soutenir, sans contre-partie, les grosses entreprises d’hier, aux business polluants, aux fiscalisations douteuses et aux méthodes de management critiquables. On aide les gros et on fait plonger les petits dans la crise, on laisse miettes et mépris aux plus pauvres qu’on laisse se paupériser. 
  • Plutôt que d’œuvrer pour une société plus libre, fondée sur la confiance en l’autre, l’autonomie et l’auto-organisation collective, on s’attaque aux libertés, même en dehors du confinement. Et ce, pour ne pas entraver la marche de l’économie d’hier. Le gouvernement prétend savoir ce qui est bon pour nous dans tous les pans de notre vie : comment on doit s’instruire, ce qui est essentiel dans nos vies, quand il faut manifester ou non,… 

Localement, ces crises systémiques ont leurs déclinaisons : 

  • La crise sanitaire et les politiques d’austérité frappent durement le CHU de Nantes et les perspectives d’avenir ne sont pas plus douces. Pendant la crise sanitaire, les fermetures de lits se sont poursuivies (plus d’une centaine !). Les conditions de travail ne cessent de se détériorer, impliquant une dégradation des soins : on paie les étudiants et stagiaires au lance-pierre pour le même travail que les titulaires ; on fait travailler des soignants positifs au covid-19 parfois même lorsqu’ils ont des symptômes ; les arrêts maladies (240 000 jours en 2019 !), les burn out et maladies professionnelles ne cessent d’augmenter. Le projet de déménagement du CHU ne fera qu’empirer la situation car sont prévues la suppression de 280 lits et de 400 postes, une antenne unique sur une zone inondable, quatre fois plus petite que les surfaces aujourd’hui utilisées par les sites Hôtel-Dieu et Laënnec dont la destruction est prévue. 
  • À Nantes et dans la région, plutôt que de sanctuariser les terres qui pourraient nous nourrir, on laisse le BTP continuer à se régaler en bétonnant les terres arables ainsi que les terres humides. Au Carnet, à Donges, à la ZAC Doulon-Gohards, à La Chapelle-sur-Erdre et ailleurs, des terres sont menacées. Les mobilisations parviennent parfois à faire reculer les bulldozers, mais pour combien de temps…? 
  • La ville continue de se faire sans nous : ici un bâtiment disparaît, là tout un quartier est redessiné, et là-bas c’est la ville qui se métamorphose sans qu’on ne comprenne bien comment, ni pourquoi, et surtout sans qu’on puisse en discuter. Pendant ce temps, les habitant·e·s sont de plus en plus nombreux à avoir du mal à trouver un logement dont le loyer est supportable, à accéder à une nourriture de qualité sans se ruiner et à obtenir un rendez-vous avec un médecin près de chez soi. Pourtant, ce ne sont pas les solutions qui manquent pour démarchandiser les réponses à nos besoins essentiels et garantir leur accès à toutes et à tous. 

Au niveau national, comme au niveau local, dé-confinons nos voix et nos libertés pour faire reculer toutes ces politiques obsolètes et irréalistes. Dé-confinons nos banderoles, nos stickers, nos affiches, investissons les rues de nos messages pour montrer que nous sommes là. Si nos corps sont confinés, nos imaginaires bouillonnent, et nous sommes prêts à construire un ailleurs enthousiasmant. Alors continuons à nous auto-organiser pour construire un autre monde, ici et maintenant. 

  • Face à la crise sanitaire, protégeons nos soignants et luttons contre la destruction de nos hôpitaux à Nantes 
  • Face aux crises sociales, ne cédons pas et créons des communautés d’entraide à l’échelle de notre quartiers, de notre rue ou de notre immeuble. 
  • Face à la mise en danger de nos libertés ne laissons pas l’idéal démocratique se confiner. Continuons à porter notre voix. 
  • Face à ces crises, continuons à bâtir un autre monde, ici et maintenant. Continuons à construire Nantes en commun. 
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