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Après un mois de confinement, le président de la République a annoncé que cette période prendrait fin le 11 mai 2020 pour une large partie de la population. Nous le voyons, le confinement a mis à nu les inégalités et injustices de notre société, les rendant insupportables. Nous avons également toutes et tous été victimes ou témoins des inégalités dans le confinement : nous ne vivons pas cette contrainte majeure de la même façon selon la qualité et la taille de notre logement, selon nos revenus, selon que nous continuions à travailler, à la maison ou sur notre lieu de travail, ou non, selon notre quartier, notre genre , notre âge… Pire, cet enfermement ne fait qu’aggraver les violences quotidiennes que subissent de nombreuses femmes et enfants au sein de leur foyer et referme les minces espaces de respiration possibles. 

Nous devons tout mettre en œuvre pour que cette période soit la moins douloureuse possible, en particulier pour les personnes les plus modestes, plus sévèrement touchées. Nous reconnaissons les premières actions de la municipalité qui vont dans le sens de plus d’entraide et de solidarité. Que ce soit à travers la mise en place d’une plateforme d’entraide, l’ouverture d’un foyer (espace Agnès Varda) et d’un gymnase, le renforcement des aides au logement ou encore la coordination entre les acteurs pour une action sociale efficace — notamment pour l’alimentation. Le Centre communal d’action sociale (CCAS) maintient également son activité et répond chaque jour aux sollicitations de nombreuses personnes en difficulté. Ces dernières peuvent solliciter des aides personnelles ou financières, par téléphone au 02 40 41 90 00, ou en ligne. Ces premiers pas vont dans le bon sens et facilitent la vie de Nantaises et Nantais. 

Nous remercions tous les agents du service public mobilisés au quotidien pour mettre en oeuvre ces améliorations, ainsi que toutes les associations et les bénévoles qui agissent au quotidien et dont le dévouement soulage bon nombre d’entre nous.

Nous pouvons aller plus loin et continuer à pallier certaines inégalités liées au confinement. C’est dans ce sens que Nantes en commun fait aujourd’hui des propositions. Des propositions pour améliorer les conditions de vie pendant le confinement pour le mois prochain. Et des propositions pour préparer la sortie du confinement qui sera notre prochain défi collectif. Surmontons le présent pour sublimer le futur.

Faciliter le dernier mois de confinement pour toutes et tous   

 1. PROTÉGEONS-NOUS

Aujourd’hui, nous pensons à celles et ceux qui répondent aux besoins de première nécessité, en première ligne les soignant.e.s mais aussi dans l’agriculture, le ramassage des déchets et le secours de première urgence, celles et ceux qui travaillent dans l’alimentation … merci et bravo ! D’autant que bien souvent, ces emplois sont précaires, à temps partiel et principalement occupés par des femmes. 

Sans elles, sans eux, la situation serait simplement invivable. Comment cela se fait-il que tous les métiers essentiels à notre société soient les plus dévalorisés ? Malheureusement les conditions dans lesquelles ces personnes travaillent ne sont toujours pas satisfaisantes parce que le matériel de protection est insuffisant. 

Par ailleurs, les organisations syndicales alertent sur le manque de précautions dans certaines entreprises ou structures, mettant ainsi en danger leurs salariés. 

Imposons aussi aux entreprises de respecter le code du travail et de stopper toute activité si les salariés sont mis en danger et faisons le maximum pour obtenir le matériel de protection pour les personnes en première ligne. Achetons des masques grand public, en tissu, lavables et réutilisables plusieurs fois pour tous les habitantes et habitants de l’agglomération nantaise comme à Clermont Ferrand ou Paris.

De plus, condamnons les propos irresponsables du préfet qui est prêt à mettre en danger des travailleurs pour sauver l’économie, notamment en appelant à poursuivre les travaux du futur CHU ou du périphérique nord. Souvenons-nous que le projet de futur CHU prévoit de fermer 330 lits, de supprimer 800 postes de soignants, en construisant un hôpital en zone inondable et difficile d’accès. Dans le contexte actuel, ce projet est d’autant plus indécent. 

2. PERSONNE À LA RUE

Il n’est pas tolérable de voir autant de personnes à la rue, en errance, alors que nous disposons de bâtiments et des moyens pouvant les accueillir. En temps de confinement, cela l’est encore moins. Beaucoup de personnes exilées vivent aujourd’hui dans des conditions de promiscuité qui favorisent la propagation du virus et rendent difficile la protection notamment des personnes les plus fragiles — par exemple à Talensac

Au nom de la solidarité et pour la santé publique :

  • Réquisitionnons les bâtiments publics et incitons les propriétaires de bâtiments de bureaux à mettre à disposition leurs locaux pour mettre toutes les personnes à la rue à l’abri 
  • Faisons en sorte que ces logements soient compatibles avec le contexte d’urgence sanitaire (salubrité, chambres séparées,…) 

3. PRENONS SOIN DES PERSONNES LES PLUS MENACÉES 

Aujourd’hui, les premiers pas d’un accompagnement des personnes en difficulté ont été faits : aide alimentaire, mise à disposition de lieux, coordination de l’action sociale par la mairie. Néanmoins, l’aide repose énormément sur les associations existantes qui ne disposent pas suffisamment de moyens. Concernant l’aide alimentaire : 

  • Faisons en sorte que tous les quartiers soient couverts.
  • Allons vers une généralisation de distributions de paniers de fruits et légumes à moindre coût, qu’ils soient issus de productions locales, de façon à soutenir les maraîchers locaux, notamment en agriculture biologique. 
  • Accompagnons sur la durée les familles qui reçoivent une aide alimentaire, car ces personnes ont généralement d’autres difficultés, liées au logement par exemple.
    Incitons les boulangeries et magasins alimentaires à faire don de leurs invendus à de associations

La souffrance se cache souvent derrière des portes et des fenêtres closes, elle est souvent indétectable. Nous pensons particulièrement aux personnes âgées, plus exposées au COVID 19, qui ont besoin de lien social. Les bailleurs sociaux et le CCAS ont commencé à appeler les personnes isolées pour prendre de leurs nouvelles, ce que nous saluons. Comment aller plus loin pour éviter des drames cachés ? Comment venir en aide aux personnes âgées qui risquent d’être encore confinées bien après le 11 mai ? 

  • Lorsque cela n’a pas été fait, installons des affiches en bas d’immeuble pour diffuser des informations sur les moyens d’obtenir de l’aide et pour communiquer sur ses besoins afin d’en informer ses voisins
  • Relançons et adaptons la médiation dans les quartiers en assurant la protection des travailleurs et des habitants
  • Mettons en place un porte-à-porte très ciblé afin d’échanger de vive voix avec les personnes isolées pour qui le lien social devient presque vital — tout en respectant les gestes de protection et avec le matériel approprié. 
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Ayons une attention particulièrement pour les femmes victimes de violence. C’est un soulagement de savoir que Citad’elles continue à accueillir les femmes qui parviennent à quitter leur maison pour ne pas subir les coups de leur conjoints. Garantissons également que les plaintes des femmes victimes de violence soient acceptées, même pendant le confinement. Car pour ces femmes, bien souvent, porter plainte est un acte particulièrement difficile, et un refus peut être vécu comme une violence supplémentaire (voir le témoignage de l’avocate Anne Bouillon). Par ailleurs, les médiateurs dans les quartiers peuvent être des interlocuteurs pour des voisins qui soupçonnent des scènes de violences conjugales. Malheureusement aujourd’hui, seulement une boîte vocale permet de les joindre. Trouvons des moyens pour que les médiateurs soient à nouveau joignables et puissent intervenir en cas de situation de violence.  

Parmi les personnes les plus isolées et les plus précaires n’oublions pas les étudiants étrangers qui sont loin de leur famille et dont la plupart des camarades sont repartis chez leurs parents. Une cellule au niveau de l’université pourrait les appeler et les aider au moins jusqu’à la fin du confinement, notamment financièrement.

5. SOULAGEONS L’IMPACT PSYCHOLOGIQUE LIÉ AUX INÉGALITÉS DE CONFINEMENT EN ROUVRANT CERTAINS ESPACES VERTS

Le confinement n’est pas vécu de la même manière par tout le monde, notamment en  fonction des conditions de logement. Pour soulager le poids psychologique et social en cette période, étudions la possibilité de rouvrir certains espaces verts où il est possible de respecter les règles de distanciation : les bords de Loire, de l’Erdre, du Cens, de la Chézine et de la Sèvre ainsi que certains parcs, par exemple Procé, les Dervallières, la Gaudinière. Identifions un parc à rouvrir à l’échelle de chaque grand quartier sous conditions sanitaires et d’organisation strictes : régulation du flux, gestion des accès,…   Parce que si nous pouvons respecter les gestes barrière dans un supermarché, nous pouvons aussi le faire dans un parc. Parce que nous avons besoin de prendre l’air. Parce que la nature nous permet de mieux supporter l’enfermement. 

Préparer la sortie du confinement 

Nous devons nous préparer à une crise économique majeure. Nous avons donc un mois pour mettre en place les aides et la solidarité nécessaires pour que les Nantaises et Nantais souffrent le moins possible de la crise à venir. 

Ne tombons pas dans le piège d’une relance économique qui favoriserait les entreprises anti-écologiques et anti-sociales, comme cela a pu se passer par le passé. Ne faisons pas de l’économie la priorité absolue de la crise, aux dépens de la solidarité et de l’entraide, aux dépens des personnes et de la nature. Les plans de relance ou d’austérité prêchés par certains ne nous ferons que retourner à la société néolibérale pré-confinement, alors que nous avons une opportunité et une chance de construire les bases d’un nouveau modèle de société. Nous ne pouvons plus mener une politique économique aveugle à la matière concrète de nos vies : le vrai débat n’est pas de savoir comment relancer la croissance mais comment répondre à nos besoins fondamentaux, que l’économie traite de manière secondaire.

La priorité de la ville de Nantes doit être de garantir la bonne santé des Nantaises et Nantais, qu’on ne saurait sacrifier au nom de l’économie, et de leur permettre de vivre dignement en assurant un accès aux besoins fondamentaux. 

  • LA SANTÉ AVANT L’ÉCONOMIE

Les couacs du gouvernement au sujet des masques, la bataille pour la poursuite des activités du BTP pendant le confinement, les nombreuses entreprises qui n’ont pas mis en place les précautions d’hygiène nécessaires, la volonté de rouvrir au plus vite les écoles pour que l’activité économique reprenne : tout cela nous incite à être prudents pour la sortie du confinement. 

  • Assurons-nous qu’aucune entreprise ne puisse rouvrir si elle n’a pas le matériel nécessaire et si elle n’a pas mis en place les consignes de sécurité adaptées. 
  • De la même façon, aucune école ne doit rouvrir si les conditions ne sont pas réunies
  • POSONS UN MORATOIRE SUR LE TRANSFERT DU CHU ET LES AUTRES GRANDS PROJETS

Nous le savons, le projet du transfert du CHU sur l’Île de Nantes est dans la droite lignée des politiques néolibérales qui ont dégradé la santé publique et qui nous ont plongé dans cette crise sanitaire. Avec ce que nous vivons aujourd’hui, il devient irresponsable de poursuivre ce projet tel qu’il était prévu — c’est-à-dire en diminuant le personnel soignants et en réduisant le nombre de lits. 

Nous rappelons que la Présidente de la métropole et maire de Nantes est également Présidente du CHU. Nous l’enjoignons de poser un moratoire sur ce projet et donc de suspendre les travaux afin qu’un débat démocratique ait lieu, ainsi que de nouvelles négociations avec l’État. 

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De la même façon, nous ne pouvons pas poursuivre les grands projets prévus avant le confinement et avant le premier tour des élections municipales. La période actuelle nous invite à revoir nos priorités et donc à suspendre un projet comme celui de l’arbre aux hérons par exemple. 

  • CONTINUONS D’ASSURER L’ACCÈS À LA NOURRITURE POUR LES PLUS FRAGILES

Parce que les difficultés que rencontrent un nombre croissant de familles à se nourrir ne vont pas s’arrêter le 11 mai — peut-être même au contraire — nous pensons qu’il faut poursuivre les dispositifs d’aide mis en place et aller plus loin. 

  • Poursuivre l’aide alimentaire et maintenir la plateforme d’entraide après le 11 mai. L’aide alimentaire est gérée aujourd’hui à Nantes par des associations, par des groupes de citoyens qui se substituent aux pouvoirs publics. Ces structures fonctionnent bénévolement avec la solidarité et les dons d’entreprises ou de particuliers. Au-delà de l’épuisement des bénévoles, nous considérons qu’il est du ressort de la municipalité de garantir une aide alimentaire pour tous. C’est pourquoi nous proposons de créer une régie alimentaire afin que la mairie garantisse l’accès à la nourriture pour ces habitants les plus en difficulté. 
  • Encourager et faciliter l’émergence d’AMAP et de groupements d’achat solidaires, dans tous les quartiers nantais, mais particulièrement les quartiers populaires. D’autant que nous ne sommes pas à l’abri d’un nouveau confinement et on a vu comme il était difficile d’accéder à des produits frais et à une nourriture de qualité dans ces conditions. Comment ? En mettant à disposition des espaces, en demandant aux équipes de quartier ou autres intervenants d’aider les habitants à nouer des contacts avec des producteurs,… 
  • Réquisitionner les terres agricoles sur lesquelles sont prévus des projets d’urbanisme pour les consacrer à l’agriculture (site de la Babinière, la ZAC Doulon-Gohards,etc.). Mettons-les à disposition d’associations et d’habitants afin qu’ils puissent y faire du maraîchage pour les ménages les plus précaires. Ce pourrait être la première étape de la mise en place de la régie alimentaire, qui en ces temps devient indispensable pour gagner en autonomie alimentaire et garantir une alimentation de qualité aux personnes les plus en difficulté. 
  • PLUS PERSONNE À LA RUE MÊME APRÈS LE 11 MAI

Assurons-nous que personne ne perde son logement dans la crise à venir. 

  • Nous appelons le département, la métropole et la ville à continuer d’alimenter le Fonds de solidarité pour le logement, afin de prendre en charge les loyers des personnes les précaires et ainsi d’assurer qu’elle ne perde pas leur logement. 
  • Mettons en place le plafonnement des loyers prévu par la loi, pour corriger les dysfonctionnements actuels, et surtout pour anticiper. 
  • Continuer à résorber les bidonvilles de Nantes et de l’agglomération, et à mettre les personnes à la rue à l’abri, par tous les moyens (réquisition de bâtiments vides, hébergements d’urgence, et accompagnement vers des logements pérennes). Soutenir (plus que d’habitude) les associations qui agissent au quotidien pour cela. 
  • ANTICIPER LES PROBLÈMES DE DÉPLACEMENT

À partir du 11 mai, des déplacements vont repartir, certainement bien plus en voiture qu’habituellement

  • Faciliter l’usage du vélo qui permet de se déplacer et respecter la fameuse “distanciation sociale”. Profiter du dernier mois de confinement pour créer des voies cyclables supplémentaires et régler les points noirs cyclables identifiés sur Vigilo, en pratiquant l’urbanisme tactique comme l’ont déjà fait plusieurs villes comme Berlin, Boston, et comme s’apprête à le faire Lyon. Dans le même sens, abaissons la vitesse de circulation des voitures à 30km/h sur l’essenti de la ville et sécurisons les intersections afin de faciliter l’usage du vélo, en particulier pour les cyclistes les moins aguerris qui vont être de plus en plus nombreux.
  • De même, octroyer davantage de place pour les piétons, comme ont commencé à le faire certaines villes. 
  • Travailler avec les associations cyclistes nantaises pour faciliter l’accès à un vélo pour celles et ceux qui n’en ont pas, en particulier pour les personnes les plus modestes. 
  • Étendre la tarification sociale pour les transports en commun afin de soulager les foyers modestes.
  • Les transports en commun vont être bien moins fréquentés par les Nantais pour se protéger du virus. Pour éviter que tout le monde ne prenne sa voiture, développons d’urgence le réseau de transports pour sortir du réseau en étoile et ainsi éviter les tronçons surchargés (notamment entre commerce et la gare). Par exemple, transformons la ligne 10 en ligne de bus en voie propre afin de mieux relier les quartiers nantais entre eux. 
  • PLUS DE SOLIDARITÉ ET D’ENTRAIDE DANS NOS QUARTIERS

Cette période de confinement a fait émerger de nombreuses actions et gestes de solidarité entre voisins et voisines. Favorisons leur maintien, pour des quartiers vivants, dans lesquels nous ne sommes plus anonymes, mais prenons soin les uns des autres. 

  • Encourageons les actions de solidarité et les vies de quartier émergentes en mettant les services de la ville à disposition des habitants, en leur facilitant l’accès à du matériel de jardinage, de convivialité, etc., et leur donnant la possibilité de consacrer un espace public, une place qui devienne un espace partagé, un commun pour les habitants du quartier.  
  • Après avoir expérimenté et apprécié une ville sans voiture, il est difficile de revenir comme avant. D’autant que l’absence de voiture facilite les échanges entre voisins et la vie de quartier et permet aux enfants de jouer dans la rue sans danger. C’est pour cela que nous proposons la fermeture des petites rues résidentielles à la voiture, pour préserver ce qui est né pendant le confinement. 
  • HALTE À LA SURVEILLANCE GÉNÉRALE

La France a fait le choix d’un confinement autoritaire (attestations, contrôles, drones et hélicoptères de surveillance…). D’autres pays comme les Pays-Bas, ont obtenu les mêmes résultats en mettant en oeuvre un confinement bien moins autoritaire. Ces derniers jours, le gouvernement a publié des appels d’offres de plusieurs millions d’euros notamment pour des drones de surveillance. Les atteintes à nos libertés sont de plus en plus nombreuses. Cette situation est intolérable. 

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La ville de Nantes ne doit pas participer à cette surenchère — notamment par le biais du Centre de supervision urbain où des agents regardent les vidéos des caméras de surveillance. Mieux, proclamons Nantes, ville qui refuse la surveillance généralisée de ses habitants. Refusons que Nantes soit survolée par des drones de surveillance ou autre.

À plus long terme

L’urgence sanitaire a brutalement posé la question des besoins fondamentaux : boire, se nourrir, se soigner,… Le gouvernement a d’ailleurs proposé (ou imposé) une définition des activités essentielles au pays — leur choix s’est porté sur l’agro-alimentaire, bien sûr, mais aussi sur les banques, parce qu’elles constituent l’un des piliers de notre société capitaliste.

Sur la gestion de nos besoins fondamentaux, la crise a révélé — pour celles et ceux qui en avaient encore besoin — que le marché, comme principe-guide de tous les pans de nos vies, est un échec. La privatisation de la santé publique nous a mené droit à la crise que nous vivons. Le marché international de l’alimentation a créé des absurdités comme le fait d’acheter des produits qui ont fait trois fois le tour du monde à bas coût, mais aussi le fait que les agriculteurs dont nous dépendons sont en grande précarité. Le marché est également responsable de notre insécurité alimentaire — puisque nous ne sommes plus autosuffisants et dépendons des importations et de l’approvisionnement par camions. Nous pouvons continuer la liste comme cela pour bien d’autres besoins… 

Le néolibéralisme et le marché soutenu coûte que coûte par l’État ne sont pas supportables. Les inégalités criantes et leur renforcement, la crise écologique majeure que nous vivons, en étaient les preuves. Alors, si les tenants, économiques et politiques, de ce système ne voulaient pas le voir, aujourd’hui ils ne peuvent plus faire semblant. 

Nos gouvernants se retrouvent impuissants face à des systèmes hyper complexes et fragiles sur lesquels ils n’ont plus la main. Sur lesquels nous n’avons plus prise, tant individuellement, que collectivement. 

L’État, nu face à la crise, tentera bien de sauver le système en recourant toujours plus à la police et à l’autoritarisme — en atteste les commandes récentes de drones de surveillance et autre matériel de maintien de l’ordre. Ce sera, c’est, un aveu supplémentaire de son échec. 

Mais localement, nous ne sommes pas impuissants. Et même, nous nous devons d’agir. Et surtout nous, habitantes et habitants, nous devons nous mobiliser, plus que jamais, parce que les politiques au pouvoir sont aussi responsables de cet échec. Plus que jamais nous devons nous réapproprier la politique, réorienter les choix de modes de vie et de modèle de société. 

Cette crise constitue un tournant. Un choix nous est imposé : est-ce qu’on relance la machine pour relancer l’économie et revenir à la situation précédente ? Ou bien est-ce qu’on profite de l’occasion pour se poser la question de nos besoins et des activités utiles pour la société ? Les politiques d’austérité et de relance ne visent qu’un objectif : relancer la croissance. Cette abstraction qui guide toutes nos politiques, mais dont on n’évalue jamais les impacts sociaux et écologiques. Cette abstraction qui était un moyen et qui est devenue une finalité en soi. Parce que le monde d’avant n’était plus viable pour le plus grand nombre d’entre nous, nous devons sortir de ces logiques qui nous enferment, qui détruisent la planète et nous-mêmes. Passons à un monde “post-croissance”. Passons à une société écologiste. À l’écologie populaire. 

Pour cela, dans les mois à venir, la priorité doit être donnée à la relocalisation et à la réappropriation collective des productions répondant à nos besoins essentiels. La priorité doit être de développer notre autonomie locale.  

C’est dans ce sens que pour les élections municipales, nous avions proposé une régie agricole et alimentaire grâce à laquelle les Nantaises et les Nantais auraient pu se nourrir. Créer une régie alimentaire, c’est affirmer que nous nourrir est une priorité. 

C’est également dans ce sens que nous proposons de créer un fournisseur d’énergie locale et renouvelable pour booster la production locale d’énergie et permettre aux habitants de se chauffer sans se ruiner, parce que l’énergie est reconnue comme une ressource indispensable qui doit faire l’objet de choix collectifs. 

C’est aussi dans ce sens que, plutôt que de dégrader toujours plus la santé publique, nous voulions non seulement revoir le projet de futur CHU, mais aussi construire des centres de santé pour une médecine de proximité accessible à tous. 

C’est aussi dans ce sens que nous proposons d’ouvrir des ateliers communaux, pour que les habitants puissent répondre à leurs besoins matériels, réparer, créer et que se développent dans nos quartiers des activités utiles à la société.

C’est aussi dans ce sens que nous plaidons pour plus de cafés et de lieux de convivialité dans nos quartiers pour favoriser l’entraide et la solidarité, qui nous rendent résilients collectivement dans les crises que nous traversons. 

C’est aussi dans ce sens, que, forts de ce lien social stimulé, nous proposons que les habitants se saisissent de plus en plus du pouvoir, via la création d’Assemblées habitantes dans chaque quartier vécu, qui prendraient la main sur des questions de proximité.

Alors ne laissons pas cette crise se transformer en opportunité pour le modèle actuel de se relever, encore plus fort et plus écrasant, mais saisissons-nous de cette occasion pour créer et changer nos modes de vie ici, à Nantes.